Agressée sexuellement par mon ex petit copain , je n’imaginais pas vivre un tel calvaire.
Je m’appelle Jasmine, j’ai 26 ans et j’ai rencontré Michel le 8 février 2022 alors que je revenais du travail. Impossible de trouver un bus disponible pour rentrer chez moi cet après-midi là, je me suis résignée à faire le trajet à pied, c’est à ce moment que Michel m’a proposé de me déposer chez moi, j’ai refusé parce qu’on est jamais trop prudent quand on vit ici en Haïti et qu’on connaît l’insécurité. Il a persisté malgré mon refus de monter dans sa voiture, alors j’ai fini par accepté. Durant le trajet on s’est pas vraiment parlé mais il voulait qu’on fasse connaissance, une fois arrivé devant chez moi il m’a demandé qu’on échange nos numéros de téléphone parce qu’il voulait en savoir plus sur moi. On a échangé nos numéros ce jour là et on a fait connaissance les jours qui ont suivi.
Deux semaines plus tard on s’était mis ensemble, je nageais dans le bonheur.
Je traversais un moment difficile durant cette période et Michel m’était d’un grand secours. Il était un homme patient, plein d’amour, gentil et attentionné.
Vu qu’il habitait pas loin de mon bureau de travail, j’avais l’habitude de passer beaucoup de temps chez lui avant de rentrer chez moi. Nous étions en symbiose, la love story dont on rêve toutes. Il s’assurait toujours que tout va bien pour moi, je me sentais en sécurité avec lui , bref, Michel était devenu ma bouffée d’air.
Au bout de quelques semaines, il commençait à afficher un autre comportement. C’était les premiers signes avant coureur, mais quand on est amoureuse comme je l’étais on devient aveugle. Il se mettait en colère pour n’importe quoi, inventait des fausses histoires. Il pouvait rester à me harceler des journées entières , à m’accuser de ne plus l’aimer, de le tromper. . A plusieurs reprises, étant chez lui, il me mettait à la porte sans raison et pouvait passer des jours sans me parler, il ne répondait pas à mes appels ni à mes textos.
Plus les semaines passaient plus il devenait distant avec une humeur exécrable et plus je me disais que ça passera. Il me frappait et ensuite il s’excusait et me disait qu’il m’aimait. C’était toujours pareil.
Un jour alors que j’étais chez lui, il m’a proposé qu’on fasse un ménage à trois avec une autre fille mineure âgée de seulement 16 ans, alors que j’étais choquée de son offre il m’a demandé de faire l’amour avec un autre homme dans son lit pendant qu’il nous assiste, sinon je devais me filmer en train de prendre mon pied avec un autre et ensuite lui montrer la vidéo. Je lui ai dit que non, je ne pouvais pas et ne voulais pas assouvir ses fantasmes, il s’est mis en colère et m’a gifflé, il m’a donné plusieurs coups de pied et de poing dans le bas ventre, il m’a jeté sur le lit et a commencé à m’étrangler. Je ne pouvais plus respirer, je me suis débattue et quand il m’a finalement lâché il s’est mis à pleurer en me disant que c’était pas de sa faute, que c’était la mienne vu que je ne suis pas obéissante. Je suis partie en courant chez moi et on s’est plus parlé durant quelques semaines. Les jours suivants j’avais des douleurs atroces partout, des douleurs au ventre et des maux de tête. J’ai été obligée de me rendre à l’hôpital pour me faire soigner. Malgré tout ça je n’ai jamais eu le courage de porter plainte contre lui. C’est très difficile d’aller au bout d’une procédure, on nous met plein de bâtons dans les roues. On se sent jugée, on nous fait comprendre que c’est de notre faute, que c’est nous qui sommes à l’origine de tout.
Un soir, c’était en septembre 2022, alors que je revenais du boulot, il m’attendait sur la route , j’étais sur une moto et il a menacé le motocycliste et m’a demandé de descendre, j’ai catégoriquement refusé. Il m’a dit que si je descendais pas il me mettrait une balle , il m’a montré son arme. J’ai pris peur , et pour diminuer le scandale dans la rue je l’ai suivi jusqu’à chez lui.
Il voulait qu’on se remette ensemble, il m’a juré de ne plus me battre. Je lui ai dit que je ne voulais plus continuer, que la relation était toxique, qu’il faut que je pense à moi même. Il n’a pas voulu m’écouter, il s’est tout de suite mis en colère , il a arraché le pantalon que je portais, ensuite arracher ma culotte et il s’est mis sur moi tout en me pénétrant il m’a dit que si je ne peux pas être avec lui je ne serai jamais avec un autre homme.
J’ai crié de toutes mes forces pendant qu’il faisait ses va et vient en moi, j’avais mal dans le bas ventre et je n’avais pas la force de me défendre. Au bout de son acte, il s’est levé comme si rien s’était passé, je me suis relevée à moitié nue et j’ai couru comme je n’ai jamais couru de toute ma vie. Je suis rentrée chez moi et je n’ai rien dit parce que je n’arrivais pas à croire que ce qui venait de se passer était réel.
Je n’ai plus eu de ses nouvelles pendant plusieurs jours, j’ai voulu porter plainte mais à chaque fois je renonçais. J’avais même voulu contacter certaines organisations féministes mais je ne pouvais pas continuer les processus.
Aujourd’hui je ne sais plus comment je vais, il y a quelques semaines j’ai appris la mort de Michel de la part d’un ami qu’on avait en commun . Je n’avais aucune émotion vis à vis de la nouvelle, j’ai juste entendu dire que des hommes armés l’ont criblé de balles. Je ne saurai jamais pourquoi.
Mon viol est récent, j’ai toujours ces souvenirs qui me hantent. Je ne sais pas si je me sens soulagée par rapport au fait qu’il soit mort mais je ne reverrai plus jamais ce visage et ça me fait du bien.
A toutes les femmes victimes de violences, je vous dis qu’il faut partir dès les premiers coups, moi je n’ai pas été capable de le faire. Il faut porter plainte, moi je n’ai pas réussi à le faire. Maintenant je veux juste vivre épanouie et profiter des opportunités comme tant d’autres filles… je ne me laisse pas freiner à cause de ce coup mais cette expérience m’a appris à être plus attentive, à être moins naïve et à penser davantage à moi-même.
Ps: Pour protéger la victime, son nom à été changé.
Jenny PRINSTON